Des années d’après-guerre jusqu’au début des années 2000, la mobilité individuelle motorisée n’a cessé de croître en France. L’essor de l’industrie automobile, le développement des infrastructures routières et la diffusion de la voiture particulière au sein de la population française se sont traduits par l’accès à l’auto-mobilité pour près de 80 % des ménages. Ce phénomène de masse s’est accompagné d’une telle amélioration des niveaux d’accessibilités au territoire et à ses aménités que le non-accès à la voiture est devenu un indicateur des inégalités individuelles. Cette situation, décrite sous le terme de « dépendance automobile » dans la littérature, conduit à s’interroger sur la stagnation voire la baisse de l’usage de la voiture actuellement constatée. Alors que les deux premières fortes hausses des prix des carburants dans les années 1970-80 n’avaient que ponctuellement ralenti la croissance des distances parcourues en voiture particulière (exprimées en kilomètres par personne et par an), celle de la période 2000-2010 coïncide avec un arrêt bien net et visible. De nombreux facteurs, démographiques, économiques, urbanistiques, technologiques et générationnels sont avancés pour expliquer cette stagnation récente. Un effet prix a bien sûr joué sa part puisque certains ménages ont été, de ce fait, économiquement fragilisés. L’impact du coût de l’énergie sur le budget des ménages constitue donc le fil rouge de cet article. Cependant, la mesure de la vulnérabilité énergétique est une préoccupation relativement récente en France, et de nombreuses questions tant conceptuelles que méthodologiques et de compréhension restent ouvertes. La réalisation de l’enquête nationale Phébus est l’occasion d’étudier l’apport de ces nouvelles données aux débats en cours. Dans ce cadre, l’objectif de cet article est d’une part de montrer l’intérêt et les limites de cette enquête pour rendre compte de la vulnérabilité liée à la mobilité quotidienne des ménages, et d’autre part de réaliser une première exploration de la double vulnérabilité énergétique transports et logement qu’elle permet.